vendredi 11 juillet 2014

Les Brésiliens n'ont qu'une envie, que l'Argentine perde contre l'Allemagne


LE SCAN SPORT - Des milliers d'Argentins déferlent au Brésil pour la finale de la Coupe du monde face à l'Allemagne dimanche soir. Ce qui a le don d'agacer au plus haut point les supporters de la Seleçao.
 

Correspondante à Rio de Janeiro
«Je suis Messi Football Club!»: de retour au centre d'entrainement de Teresopolis auprès de ses compagnons, Neymar s'est empressé de faire savoir qu'il supporterait l'Argentine dimanche contre l'Allemagne. Il ne faudrait pas en conclure qu'il exprime ainsi le sentiment de ses compatriotes, le numéro 10 en est d'ailleurs bien conscient: «Vous pouvez trouver bizarre qu'un Brésilien supporte l'Argentine, mais moi, je les fréquente au jour le jour», a-t-il justifié, en référence à son travail aux côtés de Javier Mascherano et Lionel Messi au FC Barcelone.
«Pour les Brésiliens, il n'y a pas de pire cauchemar que de voir l'Argentine couronnée au Maracana», explique Ronaldo Helal, sociologue à l'Université d'Etat de Rio de Janeiro. En apparence, la rivalité n'a pas de sens, et devrait être plutôt centrée sur l'Italie et l'Allemagne, les plus grands champions du monde après le Brésil, alors que les Argentins n'ont emporté que deux fois le Mondial. Mais la proximité régionale joue beaucoup. «Pendant longtemps, le grand adversaire était l'Uruguay, qui collectionnait les victoires, jusqu'à la mémorable défaite de la Seleçao au Maracana en 1950, mais avec le déclin de l'Uruguay, l'Argentine est devenue la bête noire des Brésiliens», poursuit Ronaldo Helal.
Qui est le plus grand? Pelé ou Maradona?
Puis est venu l'éternel débat sur le meilleur joueur de l'histoire: Pelé ou Maradona? Une discussion qui se poursuit aujourd'hui à travers le face à face de Messi et Neymar. «Si le Brésil perd contre l'Argentine en finale, je me suicide», avait assuré il y a un mois Eduardo Paes, le maire de Rio de Janeiro. Aujourd'hui, même si la Seleçao est éliminée, beaucoup de ses opposants lui rappellent avec humour sa promesse pour en exiger l'exécution.
Au Brésil, détester l'Argentine est devenu le fond de commerce de plusieurs publicités, qu'il s'agisse de vendre des bières ou des téléviseurs. La presse, en particulier régionale, amplifie encore ce sentiment. Les 130 000 Argentins venus à Porto Alegre soutenir leur équipe sont volontiers présentés comme des hordes de sauvages qui provoqueront de bagarres. Le décalage entre les moyens financiers des deux pays fait le reste: la monnaie dévaluée des Argentins les contraint à camper au Brésil, où la vie est beaucoup plus chère. Pour la majorité, ils sont venus en voiture, ils y passent souvent la nuit, et vendent des t-shirts ou des petits bracelets à l'emblème de Messi pour payer leur séjour. A l'heure du déjeuner, ils arrivent par centaines dans les restaurants populaires des municipalités, normalement destinés aux populations défavorisées.
La détestation n'est pas symétrique pourtant. Si le Brésil a élu l'Argentine en tant que rival suprême, à Buenos Aires, elle est alimentée contre le Chili, l'Uruguay et pour des raisons plus géopolitiques, contre les Anglais. La grande fierté ce n'est pas une victoire contre la Seleçao, mais les deux buts de Diego Maradona qui ont éliminé la Grande-Bretagne en 1986 au lendemain de la guerre des Malouines: la fameuse «main de Dieu», et le spectaculaire drible tout le long du terrain, qualifié de «but du siècle». Et si les Brésiliens ne connaissent de l'Argentine que son football, de l'autre côté du Rio de la Plata, on confesse adorer les plages, la bonne humeur et la musique brésilienne. La formule l'anthropologue Pablo Alabarces, professeur à l'Université de Buenos Aires, résume bien la relation: «Les Brésiliens adorent détester les Argentins, alors que les Argentins détestent adorer les Brésiliens».
Sur la plage de Copacabana, où déferle déjà une partie des 100 000 supporters Argentins attendus dimanche, l'ironie est pourtant généralisée. «Brésil, dis-moi comment tu te sens…», chantent les touristes le visage peinturluré de bleu et blanc. Le hit, lancé au début du mondial pour assurer aux Brésiliens que la Coupe reviendra à Buenos Aires est désormais agrémenté d'un refrain lancinant: «7-1, 7-1-7-1», qui fait enrager la population. «Les seuls faisant preuve de solidarité et d'élégance, dans toute cette affaire, ce sont les Allemands, qui n'ont pas fait les malins sur le terrain alors qu'ils nous infligeaient une correction, et qui appellent maintenant la population brésilienne à ne pas abandonner son équipe», pointe Ronaldo Helal. «C'est une belle leçon de fair-play, pour tous les latino-américains», conclut-il.

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